M. Simon Uzenat. Madame la ministre, l’une des questions posées par ce débat est celle de la valeur de la parole de l’État. En effet, pour 2025 était annoncé un effort pour les collectivités à hauteur de 2,2 milliards d’euros ; en réalité, il sera supérieur à 7 milliards d’euros. A priori, à regarder de près le texte budgétaire que vous nous proposez, ce sera le même niveau pour 2026.
Sur l’autonomie fiscale, j’ai bien entendu certaines des réponses que vous avez apportées. Toutefois, lorsque nous observons que les transferts financiers de l’État représentent près de 80 % des recettes réelles de fonctionnement et d’investissement pour les départements ou pour les régions, la question demeure.
Le débat, nous le voyons aujourd’hui, est bien celui de la crise des recettes, pour l’État comme pour les collectivités. La suppression de la taxe d’habitation a été financée par de l’endettement, madame la ministre, au prix d’une perte de pouvoir d’agir pour les collectivités.
Sur les ressources de financement d’investissement des collectivités territoriales, notamment rurales, vous apportez des garanties sur le fonds d’investissement pour les territoires, mais, encore une fois, la parole de l’État peut être très largement mise en doute. En effet, depuis le début de l’automne 2025, les acomptes de DSIL, jusqu’à présent autorisés à hauteur de 30 %, ne le sont plus par les préfectures. De même, nous pouvons constater la quasi-disparition du fonds vert, divisé par quatre en deux ans.
Enfin, madame la ministre, pour les régions, nous redisons notre opposition à la transformation de la part de TVA en DGF. Dans votre rapport, vous évoquez une situation financière solide pour les régions, mais la Cour des comptes tient un autre discours. Pour elle, ce sont les régions dont la situation financière s’érode qui sont les plus mises à contribution. Il faut les aider. Êtes-vous prête, notamment sur le financement des mobilités, à envisager une taxe de séjour additionnelle en lieu et place du versement mobilité régional et rural (VMRR) ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Françoise Gatel, ministre de l’aménagement du territoire et de la décentralisation. Monsieur le sénateur Uzenat, je ne voudrais pas, par des réponses rapides, priver le Sénat de débattre du projet de loi de finances et d’apporter lui-même ses réponses. Le Gouvernement présente sa copie et je pense que nous ne nous contredisons pas forcément, même si nous ne disons pas la même chose.
J’ai dit que les départements étaient les collectivités les plus fragiles, et c’est une réalité. J’ai dit que les régions, proportionnellement, reprenaient un peu de couleur après la crise sanitaire, ce qui est vrai. Pour autant, vos chiffres sont exacts.
En même temps, à mon sens, nous ne connaissons pas seulement une crise de recettes : c’est surtout une crise de dépenses. (M. Laurent Somon exprime son désaccord.)
En effet, je cite souvent cet exemple, depuis cinquante ans, nous avons conjugué la fable de La Fontaine, La Cigale et la Fourmi, en étant essentiellement des cigales, sans doute, à chaque fois, pour des motifs justes et à bon escient – sauf qu’à un moment l’ardoise est là. Et nous y sommes !
Quand on a une ambition, comme vous l’avez tous ici, et que l’on veut préserver l’avenir et les services publics, il faut se ressaisir et redresser la situation. C’est désagréable, mais nous proposons de le faire ensemble.
Vous m’interrogez sur deux points.
D’abord, l’État a maintenu ses engagements, à la fois sur la tenue du déficit 2025 – sauf dérapage au mois de décembre, nous serons au niveau de déficit annoncé – et sur le remboursement du Dilico tel que cela est prévu. Si la baisse de dotation aux investissements existe, je l’ai dit, vous ne pouvez nier que, dans un cycle électoral communal normal, l’année du scrutin est une année où l’investissement diminue.
Ensuite, vous appelez à une visibilité accrue et à une véritable pluriannualité. Je suis d’accord avec vous : je me satisferais de voir l’État capable de contractualiser avec des collectivités sur tel ou tel projet, comme il le peut aujourd’hui avec les régions seulement.
Quant au regret que vous exprimez vis-à-vis du non-versement de certains crédits de paiement, certes, je ne crois pas au père Noël, mais il me semble que certains de ces problèmes seront réglés prochainement.
Pour ce qui est de la situation des régions, je ne puis aujourd’hui me prononcer pour ou contre telle ou telle mesure.
M. le président. Il faut conclure, madame la ministre.
Mme Françoise Gatel, ministre. L’Assemblée nationale a été saisie de plusieurs amendements sur ce sujet. Les services rendus par les régions doivent être financés à la fois par l’impôt et par les dotations. Sur ces dispositions, nous verrons quelle position le Sénat adoptera.
M. le président. La parole est à M. Simon Uzenat, pour la réplique.
M. Simon Uzenat. Madame la ministre, je reprends vos propres mots : « L’ardoise est là. » Oui, l’ardoise du macronisme depuis huit ans ! (Mme la ministre s’exclame.) Quelque 60 milliards d’euros d’impôts n’ont pas été prélevés ; nous en voyons les effets aujourd’hui. Si cet argent avait été effectivement perçu, nous ne connaîtrions pas la crise actuelle. Oui, c’est bien une crise des recettes !(Mme Ghislaine Senée acquiesce.)
Enfin, madame la ministre, l’arrêt des acomptes de DSIL est une décision de l’État.
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue !
M. Simon Uzenat. Au moment où nous nous parlons, les collectivités ne peuvent plus percevoir les 30 % d’acompte permis jusqu’à présent. Vous en portez la responsabilité. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
